Le congrès du Parti socialiste qui s’est tenu ce week-end à Poitiers a entièrement confirmé le fait qu’il n’était plus qu’un appareil électoral au service de l’aristocratie financière française.
Le parti au pouvoir est profondément en crise. Il a perdu un tiers de ses membres depuis l’élection de Francois Hollande à la présidence ; seule la moitié de ses adhérents a participé au vote sur les documents censés formuler la ligne politique du parti. Il a subi des défaites cinglantes dans les trois dernières élections municipales, européennes, et départementales. Une autre est prédite pour les régionales de décembre 2015.
Le faible nombre de participants au congrès reflétait le faible intérêt pour le vote sur la politique. Il y manquait même les simulacres de débats entre tendances des congrès précédents qui opposaient les diverses cliques procapitalistes du PS ces deux dernières décennies. Contrairement aux congrès précédents, le PS organise maintenant le vote sur les diverses motions déterminant la ligne du parti et l’élection de son secrétaire général avant le congrès.
L’ambiance était morose et désabusée. La presse cite des délégués se moquant ouvertement de l’objectif du secrétaire général Cambadélis d’un demi-million d’adhérents en 2017. Un délégué cité par Le Parisien, qui titrait « Le blues des militants », dit: « On a déjà du mal à retenir ceux qui veulent partir, alors 500 000, c'est juste un choix de communication irréaliste ».
L’objectif avoué de la direction du PS était d’entériner la politique gouvernementale et de préparer la campagne électorale de Francois Hollande pour 2017.
Un autre objectif était de créer l’illusion qu’il existait encore au sein du PS une tendance vaguement réformiste qui pourrait atténuer la politique gouvernementale en faisant pression sur la direction. Elle est censée être représentée par les soi-disant « frondeurs » derrière le député de la Nièvre, Chritian Paul. Sa motion avait obtenu 30 pour cent des voix au vote pré-congrès.
Peu impressionné par les « frondeurs », le premier ministre Manuel Valls a indiqué dans son discours au congrès samedi que le gouvernement poursuivrait ses attaques contre la classe ouvrière. Il a dit que le gouvernement devait « continuer de réformer » et qu'il « n’y aura pas de pause ».
La prétention de représenter une quelconque opposition à la politique d’austérité, militariste et raciste du PS est frauduleuse et factice. L’opposition des « frondeurs », qui reproche le manque de combativité de Hollande face à Berlin, rejoint une opposition montante dans la bourgeoisie française à une politique trop conciliante envers l’Allemagne. Ils veulent aussi que l’Etat capitaliste injecte de l’argent dans les entreprises pour les rendre plus compétitives, un but qui nécessite aussi encore plus d'attaques contre la classe ouvrière.
C’est ce que signifie leur « lutte contre le chomage ». Selon la presse, Christian Paul avait voulu que le texte de synthèse à la fin du congrès aborde cette question. Ils avaient proposé à la maire de Lille, Martine Aubry, qui a elle aussi demandé plus d’investissements de la part de l‘Etat dans l’économie, de les rejoindre. Aubry a finalement préféré se rallier à la motion « libérale » de Hollande-Valls-Cambadelis, à condition qu’on accorde à sa faction assez de postes au conseil national, qui doit être élu en partie à Poitiers.
Leur « opposition » reflète aussi la crainte que la politique de dévastation sociale revendiquée par Hollande ne crée une telle colère sociale que les syndicats et divers partis de pseudo-gauche ne puissent bloquer un mouvement de masse des travailleurs.
Les syndicats et la pseudo gauche se servent de l’illusion qu’on peut faire pression sur le PS pour imposer leurs protestations creuses et inoffensives pour le gouvernment. Les syndicats ont organisé à chaque série d’attaques du gouvernment des « journées d’action » dont le but était de mener l’opposition de la classe ouvriere dans le mur et d’empêcher le développement d’une opposition politique socialiste et révolutionaire à gauche.
Lorsque les députés « frondeurs » ont rechigné à voter la loi Macron, le gouvernment s’est servi de l’article 49-3 de la Constituion et fait passé la loi sans vote du parlement. Les « frondeurs » n’ont pas voté contre le gouvernment lors de la motion de censure qui a suivi. « Personne n'a évoqué un instant l'idée de voter la motion de censure, » avait dit Christian Paul, « Nous sommes membres à part entière du groupe majoritaire. »
Paul a d’ailleurs déclaré après le vote des motions qu’il fallait « tourner la page de la fronde parlementaire ». Selon Le Figaro en ligne du 5 juin, « Christian Paul a dit souhaité réunir ‘dans les prochains jours’ Jean-Christophe Cambadélis, Emmanuel Macron et les présidents de groupe socialistes au Sénat et à l'Assemblée pour arrêter une position commune avant la seconde lecture [prochaine] du texte à l'Assemblée[en juin] ».
Ce journal cite également un proche de Cambadélis qui a expliqué la différence de score des diverse motions d’un jour à l’autre et remarquée par une adhérente: « Questionné par le Canard, un proche de Camba ne dément pas qu’il y ait eu quelques 'ajustements' en faveur de la motion conduite par Christian Paul... Et ce pour que leur score soit un peu plus flatteur. »
Jean Luc Mélenchon du Parti de Gauche et le NPA entretiennent activement les illusions sur les « frondeurs ». Le NPA se plaint sur son site web que « L’opposition à cette orientation [la politique de Hollande-Valls] qui aurait pu être incarnée par la motion des 'frondeurs' qui réclamaient haut et fort une 'inflexion' à gauche de la part de ce gouvernement a fait pschitt, ne dépassant même pas la barre des 30 pour cent ».
Quant à Mélenchon, il écrit en parlant des « frondeurs » qu’il a invité à le rejoindre il y a quelques semaines, « Je suis heureux d’observer les passerelles mises en place dans notre direction dans les éléments du texte des frondeurs. »