Perspective

Les atrocités de l’Etat islamique et les guerres impérialistes sociocidaires

Les images affichées mardi sur les réseaux sociaux confirment la destruction par l’Etat islamique (EI) du temple de Baalshamin vieux de 2000 ans dans la ville syrienne de Palmyre. Les photographies montrent des combattants de l’EI qui truffent la structure d’explosifs et la font sauter, réduisant le temple en poussière.

La démolition délibérée de ce site, l’un des plus importants centres culturels du monde antique et l’une ruines gréco-romaines les mieux préservées au monde, a succédé au meurtre une semaine plus tôt du professeur Khaled Assad. L’archéologue syrien, âgé de 82 ans, avait participé à l’excavation et à la restauration des ruines de Palmyre. Il était demeuré sur place pendant près d’un demi-siècle. Il a été décapité pour avoir refusé d’aider l’EI à piller le site.

L’UNESCO, l’agence de l'ONU spécialisée dans le domaine de la culture et de l’éducation, a dénoncé à juste titre ces atrocités comme étant des « crimes de guerre », ajoutant que « leurs auteurs devaient être tenus responsables de leurs actes. »

Ceux qui sont responsables de ces actes et d’atrocités bien plus sanglantes contre le peuple syrien sont des criminels et doivent être tenus responsables. L’obstacle principal qui empêche que les principaux responsables soient traduits en justice est le fait que ce sont d'anciens et d'actuels hauts responsables de la Maison Blanche, du Pentagone, de la CIA, et dans les capitales européennes.

Ce sont eux qui ont dévasté un pays du Moyen-Orient après l’autre, tout en se servant des forces islamistes telles que l’EI pour mener des guerres par procuration pour renverser divers gouvernements arabes.

La destruction du patrimoine culturel mondial perpétrée par l’EI a un précédent historique dans les crimes commis entre 1975 et 1979 par le régime de Pol Pot et des Khmer rouges au Cambodge. Ce régime s’était employé à éradiquer le patrimoine culturel du pays, tout en imposant un règne de terreur et de meurtre de masse à la population.

Les similitudes entre l’EI et les Khmer rouges ne se limitent pas à leurs attaques à l’encontre de la culture humaine. Dans les deux cas, les conditions préalables de ces atrocités avaient été créées par la destruction de sociétés entières par l’impérialisme américain.

Le bombardement américain du Cambodge avait largué en quatre ans 532.000 tonnes d’explosifs sur le pays, plus du triple du nombre de tonnes lâchées sur le Japon durant la Seconde Guerre mondiale. Ceci a fait jusqu'à 600.000 morts, rendu sans abri deux millions de personnes sur une population de 7 million, et anéanti la vie économique du pays.

L’EI et l’actuelle effusion de sang en Syrie et en Irak sont les conséquences directes d’actes sociocidaires commis par l’impérialisme américain et européen. En Irak, l’invasion illégale de 2003, l’occupation et la destruction systématique d'une des sociétés les plus avancées du monde arabe a coûté la vie à plus d’un million d’Irakiens et a transformé 5 millions d’autres en réfugiés. En tentant de diviser pour mieux régner, le Pentagone a attisé une guerre civile et manipulé délibérément les tensions entre les populations chiite et sunnite en Irak.

Les répercussions de plus en plus catastrophiques de cette politique, visant à asseoir l'hégémonie des puissances impérialistes sur les régions pétrolières du Moyen-Orient et d’Asie centrale, se propagent au-delà des frontières de l'Irak et de la Syrie.

Les puissances de l'OTAN sont impliqués depuis plus de 35 ans dans des guerres, à commencer par celle orchestrée par la CIA afin de renverser le gouvernement prosoviétique en Afghanistan, où la CIA s’était alliée aux forces islamistes d'Oussama ben Laden et d’autres fondateurs d’al Qaïda.

Neuf mois avant le retrait des dernières troupes américaines de l’Irak en décembre 2011, Paris, Londres, et Washington ont lancé une nouvelle guerre pour renverser Mouammar Kadhafi en Libye et imposer un régime fantoche à ce pays riche en pétrole. La destruction de l’Etat libyen et l’assassinat de Kadhafi ont précipité le pays dans un chaos et un carnage qui dure toujours. Les milices islamistes, qui ont servi de mandataires aux Etats-Unis dans la guerre libyenne furent par la suite engagées – avec l’aide de la CIA – dans la guerre civile en Syrie, renforçant l’EI et lui permettant ainsi d'envahir plus d’un tiers de l’Irak.

Au nom de l’interminable « guerre contre le terrorisme », les puissances de l'OTAN s'allient au gouvernement à dominante chiite de Bagdad pour faire la guerre contre l'EI dans les régions sunnites d'Irak, tout en intensifiant leurs opérations militaires conjointes avec la Turquie, l'Arabie saoudite et d'autres monarchies sunnites du Golfe pour faire tomber le gouvernement à dominante chiite de Bachar al Assad.

Le New York Times a publié mardi un article faisant écho aux débats au sein du gouvernement Obama sur l'éventuelle fourniture d'un soutien direct à Ahrar al-Sham, une milice islamiste sunnite liée à al Qaïda. Ce groupe bénéficie d’ores et déjà d’une aide extensive de la part d’alliés clé des Etats-Unis, la Turquie et le Qatar.

Les conséquences terribles, sur des décennies, de ces guerres américaines s’étendent à l’Europe, avec la fuite de centaines de milliers de réfugiés qui quittent des pays transformés en charniers par les interventions impérialistes.

Politiquement et moralement, le gouvernement américain et ses hauts responsables, à commencer par Bush et Obama, ainsi que les dirigeants européens, y compris Sarkozy et Hollande, sont responsables des atrocités qui découlent des guerres qu’ils ont lancées.

Aucun d’entre eux n’a été tenu responsable de ses actes. Sous le système politique actuel, ces représentants d’une oligarchie financière composée de milliardaires n'ont aucun compte à rendre aux masses, dont ils défient régulièrement l’opposition à la guerre.

La tâche de traduire en justice ces criminels de guerre et stopper la succession de guerres et la menace grandissante d’une nouvelle guerre mondiale incombe à la classe ouvrière. Elle doit mobiliser sa force indépendante dans un mouvement antiguerre international armé d’un programme révolutionnaire visant à renverser le capitalisme.

(Article original paru le 26 août 2015)

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