L’annonce faite lundi qu’une contraction du produit intérieur brut (PIB) japonais au troisième trimestre de 2014 a officiellement précipité la troisième économie mondiale dans sa quatrième récession depuis 2008. C'est un nouvel indice que l’économie mondiale, loin de connaître une reprise, est enfermée dans une spirale descendante. Le communiqué, diffusé la veille par le G20 promettant de stimuler une croissance mondiale annuelle de 2 pour cent au cours des cinq prochaines années, restera lettre morte.
Ces informations sur le Japon sont arrivées suite à des données montrant que la stagnation et la récession étaient des caractéristiques permanentes des 18 membres de la zone euro, dont l’économie combinée est plus importante que celle des Etats-Unis.
La zone euro s’est développée à un taux annualisé d’à peine 0,6 pour cent au troisième trimestre, largement en-dessous du taux de croissance d’avant 2008, d’environ 2 pour cent. L’aspect le plus significatif des données était la concentration de la récession sur les trois principales économies de la région : l’Allemagne, la France et l’Italie.
L’Allemagne, jadis le moteur de la zone euro, a échappé de justesse de sombrer officiellement en récession ; son économie ayant enregistré une augmentation d’à peine 0,1 pour cent, après une contraction de 0,1 pour cent au trimestre précédent. C’est la première fois depuis l’impact initial de la crise financière en 2009 que l’économie allemande traîne derrière le reste de la zone euro pour deux trimestres consécutifs.
L’Italie a entamé sa troisième récession depuis 2008, avec une contraction de 0,1 pour cent au troisi`eme trimestre, après une contraction de 0,2 pour cent au cours des trois précédents mois. L’économie de la France a progressé de 0,3 pour cent, mais ce n’était guère réjouissant, après une contraction au second trimestre et une croissance nulle au premier.
Un symptôme de la morosité grandissante est le fait que l’économie grecque, écrasée par des plans d’austérité successifs et un taux de chômage à 25 pour cent, a annoncé le meilleur résultat avec une expansion trimestrielle de 0,7 pour cent.
Le marasme croissant a suscité la semaine passée une mise en garde sévère du gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mark Carney. La banque centrale a revu à la baisse ses prévisions pour les prochaines deux années dans son rapport de novembre sur l’inflation, déclarant que l’inflation resterait en-dessous de l’objectif de 2 pour cent.
« Dans de nombreuses économies avancées et émergentes du monde, les indicateurs sont moribonds, » a-t-il dit. « Un spectre hante l’Europe – le spectre de la stagnation économique avec une croissance qui ne cesse de décevoir et la confiance qui continue de s'effondrer. »
Ces propos fut suivis par un commentaire du premier ministre britannique, David Cameron, lundi dans The Guardian. « Six ans après la crise financière qui a mis le monde à genoux, » écrit-il, « les voyants sont au rouge sur le tableau de bord de l’économie mondiale. »
L’état de l’économie mondiale est pire qu’elle ne l’était lors de la période initiale après le krach de Wall Street en septembre 2008. La raison en est que les soi-disant économies émergentes, qui ont fourni jusqu’à 80 pour cent de l’expansion mondiale au cours de ces six dernière années, sont actuellement en train de ralentir rapidement.
Dans les semaines qui ont suivi la crise financière, l’économie chinoise était encore en train de croître à un taux proche de 10 pour cent, grâce notamment à un plan de relance de 500 milliards de dollars et de la décision prise par les autorités d’accorder une expansion massive de crédit pour le financement d’un programme de construction et des projets d’infrastructure. Ces jours sont révolus.
La croissance chinoise se situe actuellement en dessous de l’objectif official de 7,5 pour cent et les autorités financières tentent de stopper l’expansion du crédit, craignant que le pays ne soit confronté à une crise financière majeure.
De mauvais prêts détenus par les banques chinoises ont atteint leur plus haut niveau depuis 2008. Le boom de l’immobilier dans le pays, et qui a joué un rôle crucial pour soutenir les taux de croissance durant la période écoulée, a pris fin. Lundi, le Bureau national des statistiques a rapporté que les prix des maisons neuves ont chuté, dans 67 des 70 villes qu’elle suit, par rapport à leurs niveaux d’il y a un an. Les ventes de logements ont baissé de 10 pour cent durant les premiers dix mois de l’année par rapport à la même période en 2013.
L’économie chinoise devrait progresser de 7,4 pour cent cette année, la plus faible croissance depuis 1990 ; l’agence Bloomberg rapporte que les dirigeants du Parti communiste chinois projettent de baisser la cible officielle de croissance pour 2015.
Dans d’autres grandes « économies émergentes », la situation est pareille ou pire. L’économie brésilienne a subi une récession au cours de la première moitié de cette année et ne devrait enregistrer pratiquement aucune croissance dans la seconde moitié de l’année.
L’économie russe, la neuvième du monde, est au bord de la récession en raison de l’effet combiné de la rapide chute des prix du pétrole et des sanctions imposées par les Etats-Unis et l’Europe, ce qui risque de déclencher une crise du système financie mondial.
En Europe et au Japon, ainsi que dans des pays tels que l’Australie, le credo des milieux dirigeants est le même : place aux réformes structurelles. Ceci ne produire pas d’expansion économique ; en fait, c'est un code pour intensifier les attaques contre les salaires et les conditions sociales des travailleurs.
Si ce discours n’est pas tellement entendu aux Etats-Unis c’est surtout que l’assaut mené contre la classe ouvrière, à commencer par la restructuration de l’industrie automobile opérée en 2009 par le gouvernement Obama et la réduction de moitié des salaires des travailleurs nouvellement embauchés, a déjà établi de nouvelles normes dans l’ensemble de l’économie. L’Amérique est devenue un centre de production manufacturière à bas salaire.
Il y a une autre conséquence décisive de la poursuite de l’effondrement économique mondial.
Il y a cinq ans, lors du sommet du G20 qui s’était tenu dans la foulée de la panique financière, on entendait force promesses de coopération, de collaboration et du besoin de tirer les leçons des années 1930, quand les rivalités économiques avaient conduit à l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale.
Ces engagements ont été abandonnés depuis longtemps. Le sommet du G20 de cette année à Brisbane a été marqué par une belligérance à l’égard de la Russie et des menaces à peine voilées de la part des Etats-Unis disant qu’après avoir investi leur « sang et leurs ressources » pour garantir leur domination de l’Asie-Pacifique, ils sont déterminés à sauvegarder leur hégémonie économique et militaire par rapport à la Chine, et ce au besoin par la guerre.
Les classes dirigeantes du monde entier n’ont pas solution économique à la crise du système de profit, mais seulement un programme de contre-révolution sociale et de guerre mondiale, au risque de détruire la civilisation.
La classe ouvrière internationale doit intervenir et prendre les choses en main en luttant pour un programme socialiste révolutionnaire visant à renverser le système capitaliste décrépit et à reconstruire l’économie mondiale afin de satisfaire les besoins humains.
(Article original paru le 20 novembre 2014)