La percée du Front national (FN) néofasciste et la perspective d’une perte massive de communes tenues par le Parti socialiste (PS) au dernier tour des élections municipales, demain 30 mars, fait paniquer le PS au pouvoir.
De nombreux responsables ou élus locaux du PS demandent la démission du premier ministre PS, Jean-Marc Ayrault, et un remaniement total du gouvernement par le président PS, François Hollande. La cote de popularité de Hollande et Ayrault est au plus bas, avoisinant les 27 pour cent. Selon des sondages, plus de 69 pour cent souhaitent que le président remanie le gouvernement qui est détesté et méprisé par les travailleurs et les jeunes pour ses guerres, sa politique d’austérité et ses attaques contre les droits démocratiques.
Dans les plus de 36.000 communes de France, le FN a présenté des listes dans 562 municipalités de plus de 1.000 habitants. Dans 229 communes il a obtenu les 10 pour cent des suffrages nécessaires pour se maintenir au second tour où il participera à des triangulaires avec la « gauche » bourgeoise et l’UMP.
Ce chiffre représente à peu près le double du précédent record du FN lorsqu’en 1995 il s’était qualifié pour le second tour dans 116 communes. Dans les années 1990, le FN avait remporté quatre mairies – Marignane, Orange, Toulon et Vitrolles – qui furent une catastrophe pour l'image du parti, avec une forte augmentation des taux d’imposition et l’endettement des mairies, et, dans le cas de Toulon et de Vitrolles, des mises en accusation pour détournement de fonds publics. Par la suite, le FN avait perdu toutes ces mairies.
Hormis la victoire nette, dès le premier tour avec 50,26 pour cent des voix pour la liste FN à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), ancienne ville minière et bastion PS depuis 60 ans, le FN devrait arriver en tête à Fréjus, Saint-Gilles, Forbach et Béziers.
Du fait que le FN ne dispose pas de forces suffisantes pour présenter des listes dans toutes les communes de France, il n'a obtenu, selon le ministère de l’Intérieur, que 4,5 pour cent des voix exprimées à l'échelle nationale. Toutefois, il devrait dépasser son objectif d’un millier de conseillers municipaux, ce qui représente un large progrès par rapport aux 80 conseillers élus lors des dernières élections municipales de 2008.
Dans une tentative de sauver les meubles, le PS a lancé des appels au parti de droite de l’ancien président Nicolas Sarkozy, l’Union pour un mouvement populaire (UMP), prétendant à tort qu’une soi-disant alliance de « Front républicain » fera barrage à la montée du FN.
La plupart des listes du PS ont accepté l’appel de la direction à se désister en faveur de l’UMP dans des triangulaires impliquant le PS, l’UMP et des candidats FN. Il n’y a eu que quelques exceptions, comme à Béziers, où des responsables du PS ont dit que le candidat UMP, Elie Aboud et le candidat Robert Ménard, soutenu par le FN, c'était « bonnet blanc et blanc bonnet. ».
Ceci ne contribuera cependant nullement à enrayer la montée du FN. Non seulement le PS a subi une forte rebuffade de la part de l’UMP mais de vastes sections de la bourgeoisie, y compris les couches des médias proches du PS ont de plus en plus tendance à accepter le FN comme partie intégrante de la politique bourgeoise dominante, vu que l’ensemble de l’élite dirigeante se positionne drastiquement à droite. Le président de l’UMP, Jean-François Copé, tout comme d’influents membres de l’UMP, tels l’ancien premier ministre François Fillon et Alain Juppé, ont néanmoins refusé la manœuvre de Front républicain proposée par le PS. Cela aurait signifié un désistement au second tour dans des triangulaires où les listes PS étaient mieux placées pour battre le FN.
Nombreux sont les membres de l’UMP qui préfèrent travailler avec le FN, dont la tendance Droite populaire qui le préconise ouvertement et qui est la faction la plus importante de l’UMP. Le 25 mars, le quotidien pro-PS Le Monde a approuvé les allégations de Marine Le Pen selon lesquelles les résultats du premier tour des élections municipales de dimanche dernier signifient « la fin de la bipolarisation » du PS et de l’UMP. Le journal citait la prédiction de Le Pen que la montée du FN mettait fin au « faux choix droite-gauche, » et que le FN était « devenu une grande force autonome. » Le Monde est d’accord pour dire que « Marine Le Pen est en passe de gagner son pari : celui d’imposer son parti comme la troisième force sur l’échiquier politique et de l’implanter dans les territoires. » Le journal suisse Le Matin titrait le 25 mars, « Le FN en passe d’apparaître comme un parti gouvernemental. »
Ces commentaires reflètent le fait que la « gauche » bourgeoise française ainsi que l’UMP de droite ont résolument poursuivi une politique de contre-révolution sociale et adopté un grand nombre de mesures tirées de l’arsenal politique de l’extrême-droite. Elle a soutenu les lois islamophobes contre le voile et la burqa, tout comme les guerres impérialistes brutales en Libye, en Syrie, au Mali et en République centrafricaine.
La déportation de masse des immigrés sans papiers organisée par le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls (PS) et son appel pour que l'ensemble du groupe ethnique des Roms quitte la France, reflètent le fait qu’il existe, au sein de la base sociale du PS, des forces qui soutiennent une politique qu’un régime néofasciste appliquerait avec enthousiasme.
(Article original paru le 29 mars 2014)