L'administration Obama a déclaré qu'elle présenterait sa troisième résolution consécutive sur le Sri Lanka à la réunion du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies (CDH) en mars, appelant à une enquête sur les violations des droits de l'homme. L'accent sera mis sur les exactions au cours des derniers mois de la guerre du gouvernement sri lankais contre les indépendantistes du LTTE, (Tigres de libération de l'Eelam tamoul) qui a pris fin en mai 2009.
Les gouvernements sri lankais successifs sont directement responsables de crimes de guerre pendant le conflit de 26 ans avec le LTTE, mais sous le président Mahinda Rajapakse, la guerre civile a pris une tournure encore plus brutale. Le rapport de 2011 d'un groupe d'experts des Nations Unies estime qu'environ 40 000 civils ont été tués dans les mois qui ont précédé la défaite du LTTE.
Rajapakse et ses ministres ont catégoriquement rejeté le rapport de l'ONU et nié que des crimes de guerre aient eu lieu lors de ce qu'ils décrivent comme une « opération humanitaire » de l'armée pour « libérer » la population tamoule. Malgré ses démentis, le gouvernement en appelle désespérément aux responsables américains pour bloquer la résolution et cherche à obtenir un soutien international pour empêcher son passage. Au Sri Lanka, Rajapakse continue à attiser le sentiment patriotique et anti-tamoul en affirmant que son gouvernement est la victime d'une « conspiration internationale » pour un changement de régime à Colombo.
S'il est vrai que Rajapakse est sans aucun doute impliqué dans des crimes, aucune confiance ne doit être placée dans la fausse campagne pour les « droits de l'homme » de Washington. Les Etats-Unis ne sont pas plus préoccupés par les crimes de guerre au Sri Lanka qu'il ne l'ont été par ceux commis en Irak, en Libye ou en Syrie. La mascarade des « droits de l'homme » n'est tout simplement que la bannière idéologique utilisée par l'impérialisme américain pour ses intrigues, ses provocations et ses guerres d'agression partout dans le monde. En fait, le gouvernement Rajapakse et les médias de Colombo justifient l'utilisation par l'armée sri-lankaise de la torture, des détentions arbitraires, des meurtres de civils et des autres violations des droits de l'homme en soulignant ceux qui ont été commis par les États-Unis lors de leur occupation de l'Irak et de l'Afghanistan.
Qui plus est, Washington, a totalement soutenu le gouvernement de Rajapakse lorsqu'il a rompu l'accord de cessez-le-feu avec le LTTE et repris les offensives militaires en 2006. Tout en dénonçant le LTTE, les États-Unis, ainsi que l'Inde et la Chine, ont fourni une aide militaire vitale à l'armée sri-lankaise et conservé le silence malgré l'accumulation des témoignages sur ses atrocités. Les États-Unis ont mis en place leur propre interdiction du LTTE en traquant ses partisans et ses collecteurs de fonds et ont fait pression pour que l'Union européenne fasse de même.
Les Etats-Unis et leurs alliés européens n'ont commencé à soulever des préoccupations au sujet de violations des « droits de l'homme » par l'armée Sri lankaise que lorsqu'il est devenu évident que le LTTE se dirigeait vers une défaite. L'administration Obama était préoccupée, non pas par le sort de centaines de milliers de civils tamouls, mais par l'influence croissante de la Chine, qui était apparue comme le fournisseur de matériel militaire, de prêts et d'aides au gouvernement de Rajapakse.
Un rapport de décembre 2009 du Comité des affaires étrangères du Sénat des États-Unis, « Sri Lanka : réorganiser la stratégie américaine après la Guerre » a averti que « cette dérive stratégique [du Sri Lanka vers la Chine] aura des conséquences pour les intérêts américains dans la région. » Il concluait, sans ménagement, que les États-Unis ne pouvaient pas se permettre de « perdre » le Sri Lanka et en appelait à « une stratégie intégrée qui s'appuie sur les outils politiques, économiques et de sécurité » pour préserver les intérêts américains. John Kerry, qui est maintenant Secrétaire d'État, a présidé le Comité du Sénat.
La position de l'administration Obama sur le Sri Lanka est étroitement liée au changement en cours de développement dans la politique étrangère des États-Unis, connu sous la dénomination de « pivot vers l'Asie », une stratégie globale pour miner l'influence chinoise dans toute la région et encercler militairement la Chine pour assurer la poursuite de l'hégémonie américaine. L'administration Obama a restructuré et renforcé les forces armées américaines en Asie et fait monter la pression dans des zones de tensions potentiellement explosives, telles que les différentes disputes maritimes dans les mers de Chine orientales et méridionales, comme un moyen d’isoler la Chine.
Au cours des quatre dernières années, Washington a maintenu une pression régulière sur Colombo. Ses résolutions antérieures à la CDH ont accrédité les travaux bidons de la Commission dite « Leçons apprises et réconciliation » du gouvernement Rajapakse qui a blanchi les crimes de guerre de l'armée sri lankaise. Maintenant, cependant, les États-Unis ont adopté une ligne plus dure, en faisant allusion à la mise en place d'une enquête internationale, un mouvement qui pourrait conduire à mettre Rajapakse sur le banc des accusés de la Cour pénale internationale sur les crimes de guerre.
Bien que tout à fait conscient de la menace américaine, Rajapakse affronte une aggravation de la crise économique et sociale et dépend fortement de la Chine pour l'aide économique et l'investissement. Dans le but de consolider sa position précaire, Rajapakse a intensifié ses accusations à propos d'une « conspiration internationale », déclarant que l'Occident complote pour le placer sur la « chaise électrique ». Ceux qui s'opposent ou critiquent le gouvernement sont stigmatisés comme des « traîtres à la nation ».
L'opposition menée par le United National Party (UNP) s'est alignée sur l'offensive à propos des « droits de l'homme » des USA et mène sa propre campagne factice pour la « démocratie » contre le gouvernement autocratique de Rajapakse. L'UNP, qui a été responsable du lancement de la guerre contre le LTTE en 1983 et a défendu tous les crimes de l'armée, déclare néanmoins maintenant que « le pays ne doit pas payer pour les erreurs du gouvernement ». C'est le signal que l'UNP soutient des mesures plus sévères contre Rajapakse concernant les violations des droits de l'homme.
L'Alliance nationale tamoule (TNA), qui servait de porte-parole parlementaire au LTTE, a publié une déclaration soutenant une enquête internationale sur les crimes de guerre. En retour, le TNA bourgeois cherche le soutien de Washington pour un ensemble de mesures de dévolution des pouvoirs qui consoliderait les privilèges de l'élite tamoule dans le pays. Le Janatha Vimukthi Peramuna, qui a contribué à installer Rajapakse au pouvoir et a soutenu sa guerre, critique désormais le gouvernement sur son bilan en matière de « droits de l'homme » parce que cela a rendu le pays vulnérable à une éventuelle intervention américaine.
Les soutiens les plus cyniques des pressions massives exercées par les USA sur les « droits de l'homme » sont les organisations de la pseudo-gauche, le Nava Sama Samaja Party (NSSP) et le United Socialist Party (USP), qui servent d'apologistes serviles à l'UNP et au TNA. Le dirigeant du NSSP, Wickramabahu Karunaratne, a déclaré la semaine dernière qu'il irait à la réunion du CDH à Genève le mois prochain pour ajouter sa voix aux supposés appels de Washington en faveur de la justice et des droits démocratiques au Sri Lanka.
La classe ouvrière doit rejeter les machinations des Etats-Unis et de ses alliés à Colombo et à l'étranger. En même temps, les travailleurs doivent condamner les crimes de guerre, des gouvernements sri lankais, actuels et passés. Leurs attaques contre les droits démocratiques fondamentaux des tamouls ont toujours été partie intégrante de l'assaut contre la position sociale et les droits de la classe ouvrière dans son ensemble.
L'ensemble du l'establishment politique de Colombo est responsable pour les crimes de guerre et pour l'appareil d'Etat policier qui a été développé au cours de la guerre. Depuis ce que l'on a appelé l'indépendance vis-à-vis de l'impérialisme britannique en 1948, la bourgeoisie sri lankaise a attisé et exploité le chauvinisme anti-tamoul pour diviser la classe ouvrière et maintenir son régime réactionnaire.
La classe ouvrière doit faire avancer sa propre stratégie et son programme pour s'opposer à l'impérialisme américain. Cela implique la mobilisation indépendante des travailleurs au Sri Lanka, en Asie du Sud et dans le monde entier sur la base d'un combat unifié pour une perspective socialiste. Avant tout, cela signifie se battre pour l'indépendance politique de la classe ouvrière au Sri Lanka vis-à-vis de chaque faction de la bourgeoisie, qui sont toutes entièrement inféodées à l'impérialisme.
The Socialist Equality Party calls on the working class to reject all forms of nationalism and chauvinism, in order to unite Sinhala, Tamil and Muslim workers in a common struggle against capitalism and its political defenders. The SEP fights for a Socialist Republic of Eelam and Sri Lanka as part of a union of socialist republics in South Asia and internationally. We urge workers and youth to join and build the SEP, the Sri Lankan section of the International Committee of the Fourth International.
Le Socialist Equality Party (SEP) invite la classe ouvrière à rejeter toutes les formes de nationalisme et de chauvinisme, afin d'unifier les travailleurs cingalais, tamouls et musulmans dans une lutte commune contre le capitalisme et ses défenseurs politiques. Le SEP se bat pour une République socialiste de l'Eelam tamoul et du Sri Lanka dans le cadre d'une union des républiques socialistes en Asie du Sud et au niveau international. Nous exhortons les travailleurs et les jeunes à rejoindre et à construire le SEP, la section sri lankaise du Comité International de la Quatrième Internationale.
(Article original paru le 20 février 2014)