David Miranda conteste sa détention en vertu de la Loi antiterroriste devant la Haute Cour de Londres

La Haute Cour de Londres a conclu une audience de deux jours jeudi 7 novembre à la suite de la contestation par David Miranda, le partenaire brésilien de Glenn Greenwald, ancien journaliste du Guardian, de la légalité de sa détention de neuf heures en vertu de la législation antiterroriste, le 18 août 2013 à l’aéroport de Heathrow.

La détention de Miranda et l’enquête criminelle subséquente dont il a fait l’objet est historique (voir : Le scandale de l'espionnage de la NSA et l'offensive contre la liberté de la presse). Ses biens lui ont été confisqués par la police, la première fois que le matériel de journalistes a été saisi en se servant de la Loi antiterroriste. Miranda a ensuite été décrit dans des documents préparés par la police et en ligue avec le gouvernement du Royaume-Uni et ses agences de renseignement comme étant engagé dans des activités terroristes.

Les juges Laws, Ouseley et Openshaw ont dit qu’un jugement serait déféré, la date de celui-ci devant encore en être déterminée. Greenwald est en association étroite avec Edward Snowden, le lanceur d’alerte qui a révélé la surveillance massive et systématique de la population mondiale par la NSA (US National Security Agency) et le GCHQ britannique (Government Communications Headquarters).

Quand il fut arêté a l’aéroport de Londres, Miranda venait de Berlin où il avait rencontré la cinéaste Laura Poitras, une autre associée de Snowden. Il était porteur de matériel reçu de Poitras et il rentrait chez lui à Rio de Janeiro, où il partage un logement avec Greenwald.

Lors de l’audience, les avocats du ministère de l’Intérieur ont cité un document de la Police métropolitaine. Ce document a été rédigé en consultation avec les services de renseignement. Il déclare « Les renseignement indiquent que Miranda est probablement engagé dans des activités d’espionnage qui ont le potentiel d’agir contre les intérêts de la sécurité nationale du Royaume Uni…Notre estimation est que Miranda est porteur de matériel dont il sait que, s’il était divulgué, il mettrait la vie de personnes en danger. »

« De plus, la divulgation, ou la menace d’une divulgation, est destinée à influencer le gouvernement et est faite dans le but de promouvoir une cause politique ou idéologique. Cela par conséquent tombe sous la définition du terrorisme et en tant que tel nous demandons que ce sujet soit examiné en vertu de la Clause 7 [de la Loi antiterroriste] ».

Les juges ont entendu une requête présentée par écrit, remise à la Cour par Olivier Robbins, le conseiller adjoint en matière de renseignement et de sécurité au Bureau du Cabinet. La déclaration de neuf pages disait que le gouvernement britannique était « extrêmement inquiet à propos des information dommageables attribuées au matériel hautement confidentiel volé par Edward Snowden. »

Il ajoutait: « Il y a eu et il continue d’y avoir une forte inquiétude à propos du dommage potentiel pouvant résulter de la publication de matériel approprié par Mr. Snowden et détenu par d’autres au moment de l’arrestation de Miranda. »

Les révélations faites par Snowden, affirma Robbins, permettaient à des « terroristes d’éviter la détention » et à des « états étrangers hostiles d’identifier nos officiers de renseignement et de prendre des mesures contre eux. »

On a tout essayé pour calomnier Snowden et en faire un voleur et un criminel et, par association, de noircir Greenwald et le Guardian. Robbins affirma sans citer aucune preuve que la révélation de risquait de rendre plus facile à des « pédophiles de brouiller leurs traces sur Internet. »

En déclarant que Miranda était une menace de premier ordre a la « Sécurité nationale » rien n’était trop farfelu – l’avocat du ministère de l’Intérieur Stephen Kovats a dit aux juges « Vous mettez des vies en danger [en transportant du matériel] s’il y a un risque qu’un membre d’al Qaida soulage M. Miranda de son portable et puis l’utilise dans … un but nuisible. Nous disons cela dans le sens que les objectif de la Clause 7 [font de Miranda] une personne qui nous inquiète. »

Il ajouta : « Nous ne nions pas que dans le matériel que Miranda transportait il y avait du matériel journalistique… du matériel sur lequel un journaliste avait travaillé dans le but de le publier. » Puis il ajouta encore que tout matériel venant de Snowden n’avait rien a voir avec du journalisme : « Nous ne comprenons pas le matériel ‘brut’ de Snowden comme du matériel journalistique. »

La déclaration de Jason Beer, représentant la Metropolitan Police soulignait que la détention de Miranda était seulement destinée à arrêter la publication de matériel, en partie ou à l’échelle de ce qui avait été fait par WikiLeaks.

Beer a dit : « Ils ont peut être envisagé de faire comme avait fait Mr [Julian] Assange et de mettre en ligne tout le matériel sur un ‘blog’. » Il déclara qu’ils voulaient savoir quel matériel allait être publié et si du matériel n’allait pas être publié, disant « C’était une inquiétude légitime de voir si le matériel était organisé de cette façon. »

Beer a dit que la saisie des documents divulgués par Snowden était essentielle et il se servit du mensonge standard du gouvernement selon lequel « le risque était de mettre des vies en danger ».

Le gouvernement était tout à fait conscient du caractère sans précédent de l’arrestation de Miranda et de la saisie de ses affaires. Il dit que « la police avait reçu une requête des services de sécurité de donner l’impression d’une arrestation temporaire aussi de routine que possible.

Beer a reconnu que le gouvernement britannique pouvait à présent qualifier toute activité d’activité de terrorisme selon ses désirs en vertu de la législation existante. Définissant le terrorisme, il dit : « La définition de la Section Un [du Terrorism Act] est exceptionnellement étendue…le terrorisme est le terrorisme quelque soient les motivations. »

Sa déclaration disant que quiconque, à n’importe quel moment pouvait potentiellement être considéré comme une terroriste était tellement directe que le juge Ouseley est intervenu disant : « Heureusement qu’il n’était pas en vigueur durant la deuxième Guerre mondiale, il aurait pu s’appliquer à la résistance française. »

Représentant Miranda, l'avocat Matthew Ryder dit que le gouvernement et la police s’étaient servi illégalement de la Clause 7 du Terrorism Act de 2000 pour détenir le brésilien. La saisie par la police des affaires de Miranda y compris son ordinateur était une « interférence disproportionnée contre son droit à la liberté d’expression. »

« La nature exceptionnelle de cette affaire dans la mesure où il y a eu utilisation des pouvoirs de la Clause 7 pour obtenir du matériel journalistique hautement controversé ne devrait pas être sous-estimée. »

Ryder dit que la divulgation responsable d’un tel matériel par le Guardian et d’autres journaux internationalement « n’était pas et ne pouvait pas être du terrorisme. »

Il est tout à fait probable que les juges soutiendront et considéreront la détention de Miranda par le gouvernement et la police comme légale. A la suite de la détention du fondateur de Wiki- Leaks Julian Assange à Londres en décembre 2010, les tribunaux britanniques ont émis une suite de jugements antidémocratiques foulant aux pieds ses droits démocratiques et le Droit international, et conduisant à ce qu’il cherche l’asile politique à l’ambassade d’Equateur.

Dans son argumentation, Ryder a indiqué des documents présentés à la cour et qui montraient que les policiers qui avaient appréhendé Miranda avaient pour un moment spéculé sur le fait qu’il y avait peut-être quelque complot russe basé sur le fait que c’était en Russie qu’on avait donné l’asile politique à Snowden !

En réponse, le juge Laws a dit que ce qui se passait individuellement dans l’esprit des policiers à un moment ou à un autre n’était pas aussi significatif que l’objectif général de l’opération de police. Reprenant la position du gouvernement, il dit que « les service de sécurité avaient le clair souhait d’obtenir ce matériel afin d’empêcher qu’il ne soit utilisé par les journaux. Le gouvernement voulait reprendre ce matériel. L’objectif dominant [était] dans ce cas de s’assurer que M. Miranda était en possession de ce dont les services de sécurité avaient peur et si cela était, de mettre la main dessus et de [le] neutraliser. »

Laws est aussi intervenu en faveur d’une déclaration faite par Kovats qui argumentait qu’une partie du matériel dont Miranda était porteur pouvait aider le terrorisme. Kovats dit: « En termes généraux le terrorisme consiste en plus de choses que le fait de faire exploser des bombes, » ajoutant qu’une si une personne se décrivait comme un « journaliste responsable », cela ne voulait pas dire qu’il comprenait l’importance du matériel en question.

Laws répondit « je ne sais pas vraiment ce que signifie le terme ‘journaliste responsable’. Ça ne rend pas un journaliste omniscient en matière de sécurité. C’est seulement rhétorique vraiment. »

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