Le président du parlement européen réclame des zones économiques spéciales en Grèce

Le président du parlement européen, Martin Schulz, membre du Parti social-démocrate allemand (SPD) a réclamé la création en Grèce de zones économiques spéciales (ZES). Au cours du week-end, il s’est prononcé en faveur de leur mise en place en réclamant la création d’une « agence de croissance » dans laquelle les responsables de l’UE auraient le pouvoir d’imposer des réformes dans ce pays d’Europe du Sud. Ces mesures permettraient aux entreprises internationales d’exploiter les travailleurs grecs par le biais de salaires de misère tout en étant dispensées de payer les impôts sur les sociétés.

Les zones économiques spéciales sont des régions à l’intérieur de pays où des régulations spéciales signifient que les sociétés internationales jouissent de conditions extrêmement avantageuses. Celles-ci comprennent une faible imposition sur les sociétés, des régimes douaniers spéciaux, la limitation ou l’abolition des charges patronales, l’assouplissement des règles de sécurité sur le lieu de travail, l’affaiblissement des législations en matière de protection de l’environnement et l’abrogation des conventions collectives.

Selon Schulz, la création des ZES supposerait qu’Athènes délègue un « certain degré de contrôle » sur ces régions, bien qu’il ait ensuite cherché à minimiser la signification de cette déclaration en disant que l’UE « n’est pas une puissance occupante, mais un instrument d’aide. »

Bien qu’il y ait des divergences quant à savoir qui contrôlerait de telles ZES, le gouvernement grec a signalé qu’il soutenait cette idée en annonçant la semaine dernière ses propres plans pour établir des ZES dans le but d’attirer des investisseurs privés.

« Nous pensons que ces régions vont dynamiser l’économie réelle par la création d’un régime spécial pour attirer l’investissement et susciter des exportations, » a dit le ministre du Développement économique, Costis Hatzidadis lors d’une conférence de presse. Des pourparlers avec la Commission européenne relative au projet ont déjà lieu.

La mise en place de telles zones en Grèce peut être imputée à une initiative du gouvernement allemand. Le 25 mai, 2012, l’hebdomadaire d’information, Der Spiegel, faisait état d'un plan en six points de Berlin, qui prévoit l’établissement de Zones économiques spéciales pour les Etats périphériques de l’union monétaire et secoués par la crise ; la vente d’entreprises publiques par des fonds de privatisation et des institutions fiduciaires à l’instar de l’agence fiduciaire allemande (« Treuhand ») ; la réduction du chômage au moyen de l’assouplissement de la législation sur la protection de l’emploi et en accélérant l’introduction de contrats de travail comportant une charge fiscale réduite.

Bien que le gouvernement de Berlin ait initialement refusé de confirmer officiellement ces plans, le porte-parole du gouvernement, Steffen Seibert, avait reconnu lors d’une conférence de presse en Juin que « le fait de réfléchir » à l’avenir de la Grèce nécessiterait une « analyse plus générale. »

A la mi-août, le ministre allemand de l’Economie, Philipp Rösler, a alors abandonné toute retenue en recommandant que le gouvernement grec s’adresse à la Commission européenne quant à l’établissement de Zones économiques spéciales pour « raviver » l’économie grecque.

Jusqu’à présent, les Zones économiques spéciales du type de celles que l’on trouve en Chine, en Inde, en Corée du Nord, en Russie, au Vietnam, en Moldavie et aux Emirats arabes unis n’ont existé que dans un seul pays européen, la Pologne. Elles y ont été instaurées dans les années 1990, et à l’entrée dans l’Union européenne, la Pologne avait dû accepter d’abolir les avantages fiscaux d’ici 2011 et ces zones économiques spéciales d’ici 2018.

Le fait que la Commission de l’UE, en coopération avec le gouvernement grec, envisage d’adopter de telles zones signifie une intensification considérable des attaques contre les travailleurs. Bien que dans un avenir immédiat, la mesure est dirigée contre les travailleurs grecs dont le salaire mensuel minimum a été réduit cette année de 751 à 586 euros bruts, elle touchera l’ensemble de la classe ouvrière européenne à long terme. D’autres pays européens seront obligés de suivre l’exemple de la Grèce en érigeant aussi des zones économiques spéciales, en déclenchant une spirale concurrentielle tirant les salaires vers le bas et en augmentant l’exploitation à un niveau jamais vu sur le continent européen depuis des décennies.

Le contexte de ces plans est le fait que la Grèce n’a pas rempli les objectifs de réduction des coûts dictés par l’UE, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international. Le premier ministre Samaras, a demandé pas plus tard que la semaine dernière, qu’on lui accorde « un peu d’air » pour remplir les objectifs, ce qui a provoqué des demandes que la Grèce soit exclue de la zone euro.

Pour le moment, l’UE veut toutefois éviter une telle décision, étant donné que les conséquences restent encore incalculables pour les principales banques internationales et donc pour les structures financières mondiales. La sortie de la Grèce signifierait la dévaluation des biens de la Grèce, ayant pour résultat d’entraîner une ruée sur les banques des pays touchés par la crise, tels l’Italie, l’Espagne et le Portugal et qui serait difficilement contrôlable. Dans ces circonstances, les classes dirigeantes de la Grèce et d’Europe sont en quête de moyens pour intensifier l’exploitation de la classe ouvrière grecque.

L’état d’avancement des plans concernant les zones économiques spéciales, qui sont discutés à huis clos, peut être déduit de l’annonce faite vendredi dernier par le ministère fédéral de l’Economie. Le ministre Philipp Rösler qui avait réclamé fin juillet un « sommet de l’investissement » pour la Grèce, s’envolera à Athènes durant la première semaine d’octobre en même temps que des représentants des entreprises allemands. L’occasion pour ce voyage officiel sont les nombreuses demandes des entreprises allemandes qui désirent tirer profit des nouvelles conditions en Grèce.

(Article original paru le 4 septembre 2012)

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