La restructuration actuellement en cours en Europe du constructeur automobile français PSA/Peugeot-Citroën, qui devrait résulter en un milliard d'euros d'économies cette année, sera largement étendue du fait de son partenariat avec General Motors et sa filiale Opel. Une réunion du Comité central d'entreprise (CCE) qui devrait se tenir le 25 juillet déterminera où le couperet va tomber. Ce CCE coïncidera fort opportunément avec la période des vacances, afin de minimiser la possibilité d'une résistance de masse de la part des travailleurs.
Mardi, les représentants syndicaux, se faisant les messagers du PDG de PSA/Peugeot-Citroën Philippe Varin, ont fait part des projets de ce dernier d'accroître le nombre de suppressions d'emplois en 2012, de 4 000 à 10 000, soit l'équivalent de 10 pour cent des effectifs français de la compagnie. Les syndicats n'ont présenté aucun plan pour lutter contre ces coupes.
L'usine PSA la plus immédiatement menacée est celle qui se trouve dans la banlieue parisienne d'Aulnay-sous-Bois et qui emploie 3 300 travailleurs.
Frappées par la grave récession qui sévit en Europe et le ralentissement économique mondial, les cinq derniers mois de vente de voitures de tourisme de PSA dans l'Union européenne et les pays de l'EFTA (Association européenne de libre échange) ont chuté de 14,9 pour cent, par rapport à un déclin de 7,3 pour cent dans l'ensemble de l'industrie automobile, selon l'Association européenne des constructeurs automobile (ACEA.) De nombreuses usines PSA sont à temps partiel.
Le Monde a écrit le 3 juillet que les ventes automobiles en Europe étant tombées à 13,6 millions pour une capacité de 20,6 millions, les banques estiment qu'entre 5 et 12 usines européennes devront fermer. Le quotidien cite le rappel d'Alix Partners qu'«Aux Etats Unis, face à la crise du marché automobile en 2008-2009, les grands constructeurs américains avaient fermé quinze usines. » Mais il n'a pas mentionné le rôle des syndicats, collaborant avec les entreprises et le gouvernement Obama, pour imposer aux travailleurs cette attaque.
L'attaque contre les travailleurs américains est maintenant la référence de compétitivité pour l'ensemble de l'industrie automobile européenne.
Les conditions pour maintenir la production chez PSA Sével Nord sont, selon un représentant syndical que «le futur véhicule utilitaire K0 ne sera attribué à l’usine que si les salariés acceptent de renoncer à une partie des jours RTT, et se soumettent à une flexibilité aggravée avec un gel des salaires. » Dans le même temps une restructuration massive se prépare dans le dos des travailleurs.
Selon Les Echos du 28 juin, « Cette semaine, le président du constructeur automobile, Philippe Varin, prépare le terrain, en recevant plusieurs responsables confédéraux des grandes organisations syndicales, dont Bernard Van Craeynest, de la CFE-CGC, et Jean-Claude Mailly, de FO, pour leur exposer les difficultés économiques de la fabrication en France des petites berlines de segment B, dans un contexte de coût du travail élevé. »
Le ministre du Travail Michel Sapin et le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg sont engagés dans des négociations continues avec la direction de PSA et les syndicats sur la manière d'imposer les suppressions massives d'emplois, les fermetures d'usines et la destruction des conditions de travail visant à rendre l'entreprise française compétitive et profitable.
Les ministres PS et la direction refusent de divulguer la teneur de leurs discussions. Marianne2.fr rapportait le 20 juin, « Pas une déclaration. Pas un commentaire. Ni au Ministère du redressement productif, ni à la direction de PSA. La rencontre hier entre le PDG du groupe Philippe Varin et Arnaud Montebourg s’est soldée par un effrayant silence. » A la « Conférence sociale » des 10 et 11 juillet, les syndicats, les organisations patronales et le gouvernement feront conjointement des projets pour imposer une attaque massive contre la classe ouvrière, inspirés des mesures d'austérité de l'UE et du FMI qui ont détruit les conditions de vie des masses grecques.
Le gouvernement PS joue un rôle clé dans la supervision de cette attaque contre les travailleurs de l'automobile, en ayant recours au soutien à la fois des syndicats et de la pléiade de partis de « gauche » de l'establishment politique français.
Marie-George Buffet, député du Parti communiste français et ancienne dirigeante de ce parti, a demandé que Montebourg soit « aux côtés des syndicats face aux directions pour que s’ouvre un dialogue social sur les alternatives industrielles » pour résoudre «les difficultés passagères. » Buffet fait partie du groupe parlementaire du Front de gauche qui a promis de ne jamais voter une motion de censure contre le PS.
De tels appels lancés au gouvernement PS du premier ministre Jean-Marc Ayrault et de François Hollande, gouvernement favorable à l'austérité, n'ont d'autre objectif que celui de tromper les travailleurs et de leur faire croire que le PS bourgeois va les défendre contre les banques. Mardi, Ayrault s'est engagé à faire jusque 10 milliards d'euros d'économies cette année et 38 milliards en 2013. C'est à peine si les positions de « l'extrême-gauche » divergent. Une déclaration du POI (le parti du défunt ex-trotskyste Pierre Lambert) déclare, «C’est au gouvernement qu’il revient d’interdire à PSA de sacrifier la vie de milliers d’ouvriers et de leurs familles. »
Jean-Pierre Mercier, le représentant CGT d'Aulnay et membre en vue de Lutte ouvrière n'a jamais proposé une lutte unie de tous les travailleurs de PSA pour la défense des emplois. Mais cela ne l'a pas empêché de fanfaronner dans le journal L'Humanité que, «On veut faire passer le message à nos patrons qu’ils peuvent passer des alliances entre eux. Nous, les travailleurs, on sait aussi faire des alliances entre nous ! »
Son intersyndicale avait publié une lettre ouverte au président Nicolas Sarkozy le 15 décembre de l'année dernière, plaidant pour une dispense spéciale pour son usine. «Monsieur le Président, nous vous demandons d’intervenir pour que puisse se tenir une réunion tripartite Etat-PSA-syndicats dans le but d’aboutir à un accord, garanti par l’Etat, assurant le maintien de tous les emplois sur le site d’Aulnay, au moins jusqu’en 2016. » Aucune mention n'est faite des concessions que les syndicats seraient prêts à faire pour que leur usine s'en tire mieux que les autres sites PSA.
Tous les partis de pseudo-gauche et les syndicats ont soutenu l'élection de Hollande et du PS comme alternative à Sarkozy. En fait le PS, loyal partisan du capitalisme français, ira plus loin que Sarkozy tandis que les banques intensifient leurs exigences d'austérité.
(Article original paru le 5 juillet 2012)