Vendredi après midi, Alexsis Tsipras, a présenté le programme économique de la Coalition de la Gauche radicale (SYRIZA) en vue des prochaines élections du 17 juin.
Tsipras a promis, en cas de victoire électorale, de mettre un terme aux contrats de prêt avec la Banque centrale européenne, l’Union européenne et le Fonds monétaire International et d’annuler les coupes sociales imposées ces dernières années à la Grèce. A Athènes, il a dit que, « Sitôt que le nouveau parlement aura prêté serment, la première mesure d’un gouvernement de gauche sera d’annuler le renflouement et ses lois d’application. »
« Il n’y a pas de mémorandum plus ou moins mauvais, » a-t-il dit, en faisant référence à l’accord de prêt. « Soit on applique le mémorandum, soit on l’annule… Nous, nous voulons l’annuler. »
« Faisons savoir aux gens qu’il y a encore de la démocratie en Grèce, » a-t-il ajouté.
Le programme national que Tsipras a alors présenté, prévoit le retrait des principales attaques de ces dernières années, telles la réduction des salaires minimums ou l’imposition plus lourde des masses. Il exige l’arrêt des privatisations des entreprises publiques et l’invalidation de certaines privatisations. La réduction des retraites et des salaires sera simplement gelée. De plus, les banques bénéficiant d’une aide publique devraient être nationalisées.
De telles exigences sont une réponse à la colère sociale profonde qui règne parmi les travailleurs grecs qui ont enduré ces dernières années des réductions de salaire de l’ordre de 60 pour cent et qui ont perdu, par dizaines de milliers, leur emploi.
Tsipras a affirmé que SYRIZA adopterait un impôt sur la richesse et établirait un registre des fortunes dans lequel chaque Grec devra enregistrer ses biens. Dans le même temps, SYRIZA cherche à encourager l’investissement étranger – auprès d’investisseurs qui, certainement, objecteraient à toute tentative d’enquêter et de taxer les riches.
Lors des élections du 6 mai, une écrasante majorité des électeurs a voté pour les partis qui avaient critiqué les mesures d’austérité de l’UE. SYRIZA a quadruplé ses voix et obtenu 17 pour cent. Lors des élections du 17 juin, la possibilité existe que le parti émerge comme le parti le plus fort et celui qui constitue le gouvernement.
Tsipras est en train de faire des promesses que son parti sera incapable de tenir s’il arrivait au pouvoir parce que son orientation se porte vers les partis au pouvoir et non vers la classe ouvrière.
Vendredi, Tsipras n’a rien dit sur la manière dont il appliquerait, en tant que premier ministre, ses promesses à l’encontre des dictats de l’UE et des gouvernements européens. Sa stratégie consiste à menacer l'UE de la possibilité d'un défaut de l’Etat grec afin d'obtenir des concessions. Et pourtant, il souligne constamment que SYRIZA accepte l’UE et que le parti fera tout pour rester dans la zone euro.
Lors de la présentation du programme du parti, Tsipras a souligné le fait que son parti ne mettrait pas unilatéralement un terme au contrat de prêt mais ne suspendrait que le versement des intérêts et négocierait une baisse de la dette. Ceci devrait garantir la possibilité du remboursement de la dette plus tard.
Les représentants de l’UE ont toutefois clairement fait comprendre qu’ils n’accepteront pas de renégociation des contrats de prêts et qu’ils pousseraient la Grèce à faire défaut en cas de non-respect.
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, le président français, François Hollande et la directrice du FMI, Christine Lagarde, ont tous souligné être catégoriquement opposés à de nouvelles négociations du mémorandum.
Au lieu de cela, des dispositions sont prises pour exclure la Grèce de la zone euro. En fin de compte, le groupe Euro a ordonné à ses membres d’envisager toutes les hypothèses auxquelles on pourrait s’attendre après le retrait de la Grèce et de s’y préparer. Les grandes banques européennes, elles aussi, prennent des précautions.
Au cours de ces deux dernières années, l’élite européenne a montré qu’elle était disposée à appliquer les attaques les plus brutales contre la classe ouvrière pour sauver les banques par l’apport de capital frais. Dans ces conditions, les exigences formulées par SYRIZA ne peuvent s’appliquer que par la mobilisation de la classe ouvrière européenne contre les institutions de l’UE sur la base d’une perspective socialiste. Mais SYRIZA rejette une telle perspective.
Si Tsipras devait se retrouver au gouvernement, il oublierait son programme sitôt arrivé à la table de négociation avec les représentants de l’Union européenne. En 1981 sous les attaques des marchés financiers contre la monnaie française, il n’aura fallu au président français, François Mitterrand, que huit mois pour laisser tomber ses promesses de campagne et pour faire un revirement total. Il ne faudrait à Tsipras qu’une semaine et demie.
Immédiatement après le discours de Tsipras, le porte-parole économique de SYRIZA, George Stathakis, a dit que le parti accepterait toutes les dettes étrangères : « Nous sommes prêts à tout accord, tout compromis, tant qu’il est viable. »
Lors de ses visites à Paris et à Berlin, Tsipras a dit à un certain nombre de journaux européens et américains qu’il ne voulait pas de confrontation avec l’UE. Il a dit que sous son gouvernement, la Grèce reconnaîtrait ses dettes et ne chercherait qu’à renégocier ses contrats de crédit.
Il a aussi proposé de poursuivre les « réformes à long terme » qui ont conduit à des licenciements de masse et à des réductions de salaire en Grèce. Il a cité comme modèle de sa politique le président américain Barack Obama, l’ancien chancelier Helmut Schmidt et le président français, François Hollande.
Les dirigeants européens, dont Hollande, ont montré jusqu'ici peu d’intérêt à réagir aux propositions de compromis de Tsipras. Ils exigent sa capitulation inconditionnelle et menacent de plonger le pays dans la ruine financière. Les efforts entrepris par Tsipras pour nourrir des illusions sur l’UE ne servent qu’à désarmer la classe ouvrière face à ces dangers.
(Article original paru le 2 juin 2012)